En application de l’article 265-2 du code civil, la convention conclue entre les époux, avant l’introduction de l’instance en divorce, est nulle dès lors qu’elle porte tant sur la prestation compensatoire que sur le partage de leur régime matrimonial.

Civ. 1re, 27 sept. 2017, FS-P+B+I, n° 16-23.531

L’article 265-2 du code civil dispose que « les époux peuvent, pendant l’instance en divorce, passer toutes conventions pour la liquidation et le partage de leur régime matrimonial » et précise que, « lorsque la liquidation porte sur des biens soumis à la publicité foncière, la convention doit être passée par acte notarié ».

Au regard de cette disposition, la Cour de cassation a été amenée à préciser à partir de quelle date (date de la requête unilatérale en divorce ou date de l’assignation en divorce / de la requête conjointe en divorce) débute « l’instance en divorce ».

Elle a considéré que l’instance en divorce est introduite par l’assignation en divorce si bien qu’est nulle toute convention conclue antérieurement à cet acte introductif (Civ. 1re, 19 janv. 1982, n° 80-17.149, Bull. civ. n° 27 ; 8 avr. 2009, n° 07-15.945, Bull. civ. I, n° 80 ; 17 mars 2010, n° 09-11.494).

L’arrêt rapporté rappelle cette solution classique en affirmant que la convention portant sur la liquidation et le partage du régime matrimonial « ne peut être conclue avant l’assignation ou la requête conjointe en divorce ». Au cas présent, alors que l’assignation en divorce est du 18 mars 2013, les époux avaient régularisé un protocole transactionnel le 29 juin 2011. Cette convention encourait, à l’évidence, la nullité au visa de l’article 265-2 du code civil pour ne pas avoir été conclue pendant l’instance en divorce.

La particularité de l’affaire était toutefois que le protocole transactionnel était hybride en ce sens qu’il portait tant sur la prestation compensatoire que sur la liquidation et le partage du régime matrimonial. Sur le premier aspect, il était prévu que l’octroi au profit de l’épouse d’une prestation compensatoire d’un montant de 240 000 €. Sur le second point, il était convenu que le mari serait attributaire de la propriété d’un immeuble dépendant de la communauté, moyennant le paiement d’une soulte à son épouse. L’arrêt ne dit pas si le mari souhaitait finalement renoncer au bénéfice de l’attribution de l’immeuble commun ou si, ayant refait ses calculs, il trouvait désormais excessif le montant de la prestation compensatoire allouée à son épouse. Toujours est-il qu’il en invoquait la nullité du protocole transactionnel pour violation du critère temporel posé par l’article 265-2 du code civil.

Pour échapper à l’annulation de ce protocole, l’épouse tentait d’invoquer l’article 268 du code civil qui prévoit que « les époux peuvent, pendant l’instance, soumettre à l’homologation du juge des conventions réglant tout ou partie des conséquences du divorce ». Selon elle, les époux auraient eu « seulement l’obligation de soumettre la convention ainsi conclue avant le début de l’instance au juge du divorce pour qu’il l’homologue, après que l’instance ait été initiée ».

Recentrant le débat sur le terrain de l’article 265-2 du code civil, la Cour de cassation affirme dans l’arrêt sous examen « qu’une convention comportant, ne serait-ce que pour partie, des stipulations relatives à la liquidation et au partage du régime matrimonial, ne peut être conclue avant l’assignation ou la requête conjointe en divorce ».

La solution peut sembler sévère et surprendre si on la compare à la jurisprudence de la Cour sur l’applicabilité de l’article 1589-2 du code civil aux promesses unilatérales de vente incluse dans une transaction ou dans un crédit-bail immobilier. L’enseignement de l’arrêt pour les praticiens est donc que constitue désormais une convention pour la liquidation et le partage du régime matrimonial (au sens de l’art. 265-2 c. civ.) une convention qui, ne serait-ce que pour partie, comporte des stipulations relatives à la liquidation et au partage du régime matrimonial. La bonne pratique est donc de ne conclure une telle convention qu’après l’assignation en divorce ou la requête conjointe en divorce et de préciser, au visa des articles 265-2 et 268 du code civil, si elle sera soumise à homologation par le juge aux affaires familiales.

Parce que la question n’était pas posée à la Cour, l’arrêt rapporté passe sous silence la question de la forme du protocole transactionnel. Alors qu’il prévoyait que le mari serait attributaire de la propriété d’un immeuble dépendant de la communauté, le protocole ne semble pas avoir été passé par acte notarié. Les époux paraissent avoir signé le protocole d’accord transactionnel « en présence de leurs avocats ». Les faits conduisent donc à se demander si la forme notariée imposée par le second alinéa de l’article 265-2 du code civil est requise ad probationem ou ad validitatem. On peut penser que l’exigence de la forme notariée n’est pas sanctionnée par la nullité de la convention pour la liquidation et le partage du régime matrimonial. Reste que la publicité foncière sera problématique en l’absence d’acte notarié…

Source DALLOZ