Dans un arrêt du 9 mai 2019, la Cour de cassation autorise le recours à la rupture conventionnelle pour le salarié déclaré inapte à son poste à la suite d’un accident du travail. Seuls la fraude ou le vice de consentement remettraient en cause cette rupture conventionnelle
Cass. soc., 9 mai 2019, nº 17-28.767

Se prononçant régulièrement sur la question de la validité de la rupture conventionnelle conclue entre un employeur et son salarié, la chambre sociale a, petit à petit, ouvert cette possibilité à différentes situations et notamment dans des hypothèses où le Code du travail prévoit des dispositions protectrices encadrant la rupture du contrat du salarié.

Ainsi, elle a déjà admis qu’employeur et salarié pouvaient conclure une rupture conventionnelle homologuée :

• – au cours d’une période de suspension du contrat de contrat consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle (Cass. soc., 30 sept. 2014, nº 13-16.297) ;
• – lorsque la salariée est en congé maternité (Cass. soc., 25 mars 2015, nº 14-10.149).

Néanmoins, elle ne s’était pas encore prononcée sur la possibilité de conclure une rupture homologuée avec un salarié déclaré inapte à son poste de travail à la suite d’un accident du travail.

L’on sait que les Hauts magistrats avait toutefois exclu la possibilité pour les parties de signer une rupture d’un commun accord du contrat de travail qui aurait pour effet d’éluder les obligations de l’employeur, à savoir reclassement, licenciement ou paiement des salaires (Cass. soc., 29 juin 1999, nº 96-44.160 ; Cass. soc., 12 févr. 2002, nº99-41.698).

Une jurisprudence qui pouvait laisser présager le rejet par la chambre sociale de la possibilité de conclure une rupture conventionnelle homologué avec un salarié déclaré inapte à la suite d’un accident du travail. D’autant que l’Administration avait expressément exclu cette hypothèse, cette modalité de rupture ne devant pas « s’inscrire dans une démarche visant à contourner des procédures et des garanties légales », et notamment celles relatives aux ruptures pour inaptitude médicale (Circ. DGT nº 2008-11, 22 juill. 2008).

C’est pourtant une décision inverse qu’ont prise les Hauts magistrats. Dans une affaire, une salariée, déclarée inapte à la suite d’un accident du travail, avait signé une rupture conventionnelle homologuée par l’Administration. Revenant sur sa décision, la salariée avait alors saisi le tribunal afin de faire annuler la convention de rupture au motif que celle-ci contournait les dispositions protectrices du Code du travail relatives à l’inaptitude professionnelle et en particulier celles relatives à l’obligation de reclassement (C. trav., art. L. 1226-10).

Approuvant les juges du fond d’avoir débouté la salariée de ses demandes, la Cour de cassation énonce pour la première fois le principe selon lequel « sauf cas de fraude ou vice de consentement, non allégué en l’espèce, une convention de rupture pouvait valablement être conclue par un salarié déclaré inapte à son poste à la suite d’un accident de travail ».
Il est donc possible de conclure une rupture conventionnelle avec un salarié inapte dès lors que celle-ci est librement consentie par les deux parties, à charge pour la partie qui invoque la fraude ou le vice du consentement d’en apporter la preuve.

La décision de la chambre sociale reprend les principes déjà posés dans une affaire rendue à propos d’une rupture conventionnelle conclue avec un salarié déclaré apte avec réserves (Cass. soc., 28 mai 2014, nº 12-28.082).

À noter que l’arrêt du 9 mai 2019 rendu dans le cas d’une inaptitude d’origine professionnelle s’applique, a fortiori, dans le cas d’une inaptitude non professionnelle.

Source WOLTERS KLUWER