La loi Pacte est parue au Journal officiel, après avoir été partiellement validée par le Conseil constitutionnel. Celui-ci a déclaré l’article 11 de la loi, qui modifie les règles de décompte de l’effectif salarié d’une entreprise pour l’application de certaines obligations sociales, conforme à la Constitution. D’autres dispositions, à l’instar de l’article 19 posant de nouvelles conditions de travail en soirée dans les commerces de détail alimentaire, n’ont pas passé ce cap

L. nº 2019-486, 22 mai 2019, JO 23 mai – Cons. const., 16 mai 2019, nº 2019-781 DC, JO 23 mai

Censure des dispositions sur le travail en soirée

Saisi de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi « Pacte », le Conseil constitutionnel a rendu le 16 mai un avis partiellement conforme. Dans le domaine qui nous intéresse, le social, il a censuré l’article 19 relatif aux conditions du travail en soirée dans les commerces de détail alimentaire. Celui-ci inscrivait ces commerces sur la liste des secteurs bénéficiant d’une dérogation en matière de définition du travail de nuit. Rappelons en effet qu’à titre dérogatoire, dans des secteurs comme la presse, la radio, le cinéma et la télévision, la période de travail de nuit est d’au moins sept heures consécutives (au lieu de neuf heures) et doit comprendre l’intervalle entre minuit et 5 h. La loi Pacte prévoyait d’étendre cette dérogation aux commerces de détail alimentaire mais cette mesure, considérée comme un cavalier législatif par le Conseil constitutionnel, est censurée. De même que les articles 191 et 192 relatifs aux comités sociaux et économiques : le premier de ces articles, relatif à la consultation sur les orientations stratégiques de l’entreprise, prévoyait de remplacer le droit de réponse du CSE par la possibilité d’un débat.

Les seuils jugés conformes
Le conseil a en revanche déclaré conforme à la Constitution de 1946, l’article 11 de la loi modifiant les règles de décompte de l’effectif salarié d’une entreprise pour l’application de plusieurs obligations en matière sociale.

Cet article insère dans le Code de la sécurité sociale un article L. 130-1 qui précise que, pour l’application de ce code, l’effectif salarié annuel de l’employeur correspond à la moyenne du nombre de personnes employées au cours de chacun des mois de l’année civile précédente. Par exception, le franchissement à la hausse de ce seuil n’est pris en compte que lorsque ce dernier a été atteint ou dépassé pendant cinq années civiles consécutives. Le franchissement à la baisse de ce seuil est, lui, pris en compte dès la première année.

Les sénateurs auteurs de la saisine soutenaient que l’asymétrie des règles de franchissement à la hausse et à la baisse des seuils favorisait des stratégies de contournement de la loi, « consistant à priver d’effet le dépassement du seuil pendant plusieurs années, en l’interrompant par une année de baisse de l’effectif en deçà du seuil requis, afin que ce dépassement ne puisse être pris en compte ». Il en résulterait, selon eux, une méconnaissance du huitième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 aux termes duquel « tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises » et d’une rupture d’égalité.

Des arguments que le Conseil constitutionnel écarte aux motifs, tout d’abord, qu’« aucune des dispositions en cause n’affecte les garanties relatives à la participation des travailleurs, par l’intermédiaire de leurs délégués, à la détermination collective des conditions de travail ». Ces règles, précise en effet le gouvernement dans ses observations, « ne sont applicables qu’aux dispositifs limitativement énumérés par la loi […] , relatifs à certains prélèvements fiscaux ou sociaux, à des avantages ouverts aux dirigeants ou aux salariés (chèques-vacances, participation et intéressement, abondement du compte personnel de formation, covoiturage), au fonctionnement interne de l’entreprise (procédure de recueil des signalements des lanceurs d’alertes, référent « harcèlement », document d’adhésion au service de santé au travail, prêt de main-d’œuvre) […] . Elles ne s’appliquent pas en matière d’instances représentatives du personnel ni, plus largement, dans le domaine de la négociation collective ».

Ensuite, « l’éventualité d’un détournement de la loi ou d’un abus lors de son application, pour regrettables qu’ils soient, n’entache pas celle-ci d’inconstitutionnalité ».
Enfin « la différence de traitement contestée, qui est ainsi fondée sur une différence de situation, est par ailleurs en rapport avec l’objet de la loi, qui est de favoriser la croissance des entreprises en atténuant certains effets de seuils ».

L’article 11 ne méconnaît donc aucune exigence constitutionnelle.

Réforme de l’épargne salariale

En matière sociale, outre les dispositions relatives aux seuils d’effectif, la loi Pacte prévoit une réforme des plans d’épargne retraite et de l’épargne salariale.

Source WOLTERS KLUWER